- PÉLITES
- PÉLITESLe terme «pélite» (du grec pelos , boue) désigne traditionnellement une grande variété de roches sédimentaires formées d’éléments fins. Certains auteurs, cependant, le réservent aux sédiments meubles (poudres ou argiles, limons ou silts) constitués par ces éléments [cf. GRANULOMÉTRIE]; d’autres appellent au contraire pélites les seules roches issues de la consolidation de ces sédiments, comme on le fera dans cet article, et préfèrent désigner l’ensemble des roches à grains fins (diamètre inférieur à 50 猪m), consolidées ou non, du nom de «lutites» (lutum , boue).La présence éventuelle de micro-organismes ou de débris végétaux ou animaux peut conférer aux pélites un grand intérêt stratigraphique. On rencontre ces roches dans de nombreux niveaux de la série géologique, où elles représentent généralement d’anciennes boues ayant évolué en milieu lacustre ou marin. Bien souvent, les pélites entrent dans la constitution d’ensembles sédimentaires, soit sous forme de ciment comme dans les molasses ou dans les tillites, soit en tant que composant d’une séquence comme dans les flyschs. À ce dernier titre, elles jouent un rôle important dans la morphologie des régions montagneuses.TerminologieDe même que l’opinion des auteurs diverge sur l’attribution du mot «pélite» à des lutites consolidées ou non, de même il existe des nuances concernant la limite granulométrique supérieure à leur attribuer (50 ou 64 猪m). On appelle «microgrès» les roches intermédiaires entre les pélites et les grès. Le terme «pélite» a, par ailleurs, divers synonymes. C’est ainsi que l’on appelle parfois les roches fines consolidées des «aleurolites», les roches meubles correspondantes étant nommées des «aleurites» (aleuros , poussière). Les auteurs anglo-saxons introduisent une distinction en appelant «silt-stones » les pélites à grains de la classe des silts (diamètre compris entre 50 et 2 猪m) et «claystones » ou «mudstones » celles à grains de la classe des poudres (face=F0019 麗 2 猪m), pour lesquelles les auteurs français emploient aussi le mot «argilite» (qu’il ne faut pas confondre avec le terme anglais «argillite », pélite non seulement durcie mais déjà schisteuse). Lorsque les pélites présentent un litage dû à la sédimentation (et non à un début de métamorphisme comme chez les argillites), on utilise parfois le terme anglais «shale », recommandé par G. Millot; lorsque le feuilletage est très net et que la roche est fissile, il est préférable de parler de schiste ou d’ardoise.Malgré son imprécision, le terme «pélite» est commode, comme vont le montrer les exemples qui suivent, pour désigner de nombreuses roches ayant comme caractères communs d’être plus ou moins consolidées (il y a tous les intermédiaires entre une molasse tendre et un microquartzite) et formées d’éléments fins, disposés sans ordre ou lités, sans prétendre toutefois à la schistosité.Pélites détritiquesLes pélites quartzeuses, ou microquartzites , sont des roches très dures à cassure esquilleuse ou conchoïdale; elles sont parfois colorées en noir par de la matière organique et ont alors l’aspect de lydiennes (cf. roches biochimiques et chimiques SILICEUSES). Le ciment des microquartzites peut, comme celui de leurs équivalents gréseux, être contemporain du dépôt (ciment primaire) ou s’être formé postérieurement, par exemple à la suite de circulation d’eaux chargées en silice.Les pélites quartzo-argilo-micacées sont les plus répandues. Elles entrent dans la séquence de la plupart des flyschs, soit qu’elles résultent du dépôt de particules en suspension apportées par les fleuves sur le plateau ou le talus continental (sédimentation primaire), soit qu’elles marquent la phase terminale de la grano-décroissance qui caractérise les séquences de turbidites (resédimentation). C’est dire qu’elles sont largement représentées parmi les roches sédimentaires. Ces pélites détritiques sont généralement pauvres en fossiles mais peuvent conserver de belles empreintes (flysch à helminthoïdes). Souvent laminées (shales), elles présentent des lits très fins alternativement gréseux et micacés. La nature des minéraux argileux donne de précieuses indications sur le régime bioclimatique des continents d’origine, à condition que l’on tienne compte des triages ayant pu survenir avant et pendant le dépôt, et des transformations consécutives à la diagenèse. Sous l’effet du métamorphisme et par l’intermédiaire des schistes, ces roches passent à des micaschistes, puis à des gneiss (séquence alumino-silicique ou «pélitique»).Les grauwackes («roches grises», en anglais greywakes , lorsqu’elles sont à grains fins, font partie des pélites. Ce sont alors des microgrès quartzo-feldspathiques dans lesquels entrent des débris et des minéraux de roches volcaniques (augite, hornblende, etc.). Sur le terrain, elles ont l’aspect de flysch, mais sont de coloration plus sombre, et d’âge plus ancien (faciès «culm» du Carbonifère des Vosges). Des pélites ferrugineuses, très altérables, leur sont souvent associées, en particulier dans les Coal Measures des États-Unis et de Grande-Bretagne.Pélites d’origines diversesLes pélites volcano-détritiques, qui sont improprement appelées cinérites (latin cinis , cineris , cendres) car elles résultent de la cimentation non pas de cendres, résidus de combustion, mais bien de granules et de poussières volcaniques, peuvent s’être déposées à sec sur un sol qu’elles fossilisent, comme celles du massif du Mont-Dore, blanches et porcelanées. Beaucoup se sont sédimentées dans les lacs, emprisonnant des débris végétaux, des batraciens, des poissons et des insectes, comme les cinérites du lac Chambon en Auvergne. Au Carbonifère, des lits de fines poudres volcaniques devenues dures sont appelés tonstein (pierre d’argile) dans les bassins houillers nordiques et gore dans celui de Saint-Étienne. Les tonsteins sont caractérisés par la présence de leverriérite, association de lamelles de micas gonflés comme des accordéons par croissance épitaxique de kaolinite entre les feuillets. Cinérites et tonsteins, lorsqu’ils se sont déposés sur un vaste territoire, ont un grand intérêt stratigraphique car ils représentent un moment quasi-instantané de l’histoire de la Terre (téphrochronologie). On peut rattacher aux cinérites les argilolites (pélites au sens strict de certains auteurs), issues de la décomposition de matériaux volcaniques (exemple: permien de Lodève).Les pélites calcaires, ou calcilutites , ont un ciment cristallisé (sparite) ou non (micrite); les éléments étrangers au ciment (ou allochèmes) peuvent être des débris de fossiles (foraminifères en particulier), des micro-oolites, des microgranules ou des intraclastes arrachés à un dépôt calcaire déjà consolidé avec une petite proportion d’argile. Ces roches sont très fréquentes dans la série géologique, en particulier dans les épisodes carbonatés du Jurassique (Dogger du bassin de Paris, Tithonique alpin, etc.), où elles ont été exploitées comme calcaire lithographique.On appelle parfois grauwackes de décalcification d’anciennes pélites calcaires dont les fossiles, dissous aux affleurements, ont laissé leur moule en creux (grauwackes du Coblencien des Ardennes).Les pélites argilo-calcaires , sortes de marnes consolidées, peuvent receler une microfaune et une microflore riches en restes d’organismes planctoniques.Les ampélites sont des pélites qui contiennent une forte proportion de matière carbonée dérivée de matières organiques, et sont riches en pyrite, d’où leur usage ancien pour amender les vignes (en latin ampes ). Les ampélites du Silurien ont conservé des restes de graptolites préservés par une mince pellicule de matière charbonneuse.Il faut noter enfin que les pélites peuvent constituer la matrice de certains schistes, grès et conglomérats. Ainsi les calcschistes présentent-ils une alternance de lits calcaires et de lits pélitiques silico-alumineux. Certaines molasses, roches accumulées dans les dépressions lacustres ou marines, au pied de reliefs en voie de surrection, sont des grès microconglomératiques à ciment calcaro-pélitique. Le ciment des tillites, formations d’origine glaciaire faites d’un mélange consolidé d’éléments de tailles variées, est assez souvent pélitique.
Encyclopédie Universelle. 2012.